Monsieur le Président,Mesdames, Messieurs, les députés
Si j'interviens aujourd'hui à cette tribune, Ministre de la Santé, femme et non-parlementaire, pour proposer aux élus de la nation une profonde modification de la législation sur l'avortement, croyez bien que c'est avec un profond sentiment d'humilité devant la difficulté du problème, comme devant l'ampleur des résonances qu'il suscite au plus intime de chacun des Françaises et des Français, et en pleine conscience de la gravité des responsabilités que nous allons assumer ensemble.
Mais c'est aussi avec la plus grande conviction que je défendrai un projet longuement réfléchi et délibéré pour l'ensemble du gouvernement, un projet qui, selon les termes même du président de la République, a pour objet de «mettre fin à une situation de désordre et d'injustice et d'apporter une solution mesurée et humaine à un des problèmes les plus difficiles de notre temps».
Si le gouvernement peut aujourd'hui vous présenter un tel projet, c'est grâce à tous ceux d'entre vous – et ils sont nombreux et de tous horizons – qui, depuis plusieurs années, se sont efforcés de proposer une nouvelle législation, mieux adaptée au consensus social et à la situation de fait que connaît notre pays.
C'est aussi parce que le gouvernement de M. Messmer avait pris la responsabilité de vous soumettre un projet novateur et courageux.
Chacun d'entre nous garde en mémoire la très remarquable et émouvante présentation qu'en avait fait M.Jean Taittinger.
C'est enfin parce que, au sein d'une commission spéciale présidée par M. Berger, nombreux sont les députés qui ont entendu, pendant de longues heures, les représentants de toutes les familles d'esprit, ainsi que les principales personnalités compétentes en la matière.
Pourtant, d'aucuns s'interrogent encore : une nouvelle loi est-elle vraiment nécessaire ?
Pour quelques-uns, les choses sont simples : il existe une loi répressive, il n'y a qu'à l'appliquer.
D'autres se demandent pourquoi le Parlement devrait trancher maintenant ces problèmes : nul n'ignore que depuis l'origine, et particulièrement depuis le début du siècle, la loi a toujours été rigoureuse, mais qu'elle n'a été que peu appliquée.